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CHRONIQUE

Titre : LES ÉDENTÉS

Auteur : PATRICK LAGACÉ

Date : 19 mars 2021

LA PRESSE

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** RÉPONSE **

 

(Je sais que mon texte est long - l’équivalent de 5 ou 6 articles du Devoir en longueur, mais j’y ai compacté un maximum d’informations importantes donc je pense qu’il en vaut la chandelle. Je m’adresse à Patrick Lagacé quand j’écris car je lui réponds, mais en fait j’en n’ai rien à faire qu’il le lise ou non. Ce que je voudrais, c’est que les gens qui ont lu sa chronique lisent mon texte.)

 

Salut Lagacé, en lisant ton texte de vendredi dernier, voici exactement la première chose qui m’est sortie de la tête et que je t’aurais dite : « Patrick Lagacé mon osti de trou de cul, j’en peux pu de te lire débiter tes conneries dans chaque osti de torchon que tu ponds dans feu-la pute de la rue St-Jacques (asteure OBNL ché-pu quoi, « La Paresse, avec un gros chèque de BS de riche, a.k.a. subvention » c’est ça ?) » Ça a peut-être l’air un peu méchant, mais je pense que c’est important que tu le saches que c’était ma réaction première, oui oui, tes textes peuvent provoquer ce genre de réaction. Et je suis un gars assez tranquille et gentil, tsé. Imagine si ma réaction était légitime ? Bon, à vrai dire, c’est pas assez précis. Après réflexion et après m’être calmé, ce que je t’aurais dit est « tanné de te voir écrire des conneries sans que personne prenne la plume pour réagir à ce que tu as écrit. » Faque j’ai décidé de te répondre.

 

J’espère vraiment que tu vas tomber sur mon texte. C’est le texte, un jet de vomi d’écoeurantite que tu as provoqué, de quelqu’un qui s’est senti très visé par tes propos écœurants et qui en a vraiment plein le cul.

 

Même si je ne me revendique pas de l’étiquette « complotiste » (d’ailleurs je ne connais personne qui s’en revendique, c’est une étiquette que des gens collent sur d’autres gens, la plupart du temps sans se soucier d’avoir l’aval de ceux-ci), je me suis senti visé parce que je fais mienne la phrase du philosophe Edgar Morin : « Toute contestation d'une affirmation officielle ou d'une croyance largement répandue peut être désormais considérée comme "complotiste" »[1], c’est-à-dire que contester, voire même ne serait-ce que douter (donc s’interroger, donc penser), est de plus en plus assimilé à du « complotisme/conspirationnisme » ("conspiracy theorist"). Je suis un universitaire diplômé en maîtrise, justement en sociologie, ayant entamé un processus de doctorat. La formalisation des démarches et la trop grande rigidité, robotisation, stupidité et bureaucratisme (style « maison qui rend fou » dans Astérix) m’ont, pour l’instant, découragé de poursuivre dans cette voie. C’est ça pour la petite présentation liminaire, maintenant on va jouer à un jeu, je vais commenter ton torchon, OK ? En vert, c’est moi, en noir, gris ou bleu (dépendant du thème) c’est Patrick Lagacé. Ça commence comme suit :

 

Je regarde aller les conspirationnistes. Samedi, ils défilaient encore à Montréal. Ils ne lâchent pas. Grosse manif, avec de gros mots écrits sur leurs pancartes.

 

Je ne comprends pas pourquoi tu appelles systématiquement « conspirationnistes » tous les citoyens québécois qui, provenant de plusieurs horizons de pensée, se rassemblent à une manif le 13 mars, manif dont l’objet est seulement d’être « contre les mesures sanitaires » ? Toi-même récemment t’as écrit « Où j’ai envie d’entrer en dissidence » ce 12 janvier 2021, où tu disais ceci, j’ai pas le choix de te rappeler tes propres paroles du 12 janvier, tu dis :

« Ce couvre-feu national, je sais qu’il relève du symbolique plus que du scientifique. Je trouve que le gouvernement l’a fort mal vendu, avec juste ce qu’il faut d’impatience pour ceux qui ne se rallient pas spontanément à cette mesure qui reste liberticide.

Interdiction de se déplacer entre 20 h et 5 h : ça fait lever un sourcil, on peut se poser une ou deux questions. On peut encore poser des questions, oui ?

Quand le député solidaire Gabriel Nadeau-Dubois a demandé des preuves scientifiques de l’efficacité des couvre-feux pour endiguer des virus — il y en a peu —, le chef de cabinet du PM, Martin Koskinen, lui a reproché de tomber dans les théories du complot

Juste ça !

À ce compte-là, je suis le nouveau shaman de QAnon.

Un coup de sang, bien sûr, mais on me permettra de dire que le gouvernement devrait renouveler ses efforts de pédagogie : on sent moins d’enthousiasme chez bien des gens, qui ne sont pas forcément du genre à se déguiser en chien ou à croire à l’omnipotence de l’État Profond Mondial. »

Tu serais pas justement en train de tomber dans un écueil que tu dénonçais toi-même il y a seulement 2 mois ? Tu traites à qui mieux-mieux les gens de conspirationnistes alors que ce sont des gens qui se posent des questions, ou qui ne sont pas d’accord avec des mesures que tu as reconnu toi-même comme restant liberticides ? Écoute j’suis désolé Lagacé, mais niveau cohérence sacrament… on va continuer de lire ton texte à la lumière de cette citation du toi d’il y a 2 mois (!) que je viens de ramener. Je voulais aussi juste te dire à propos de l’ « État Profond Mondial » qu’il n’y a pas que Trump qui parle du marais (swamp, deep state), mais Macron a aussi utilisé ces mots le plus sérieusement lorsqu’il a pris la parole en public officiellement, selon le Monde diplo[2]. Tu vois, pas besoin d’être un crack-pot.

 

Le symbole qui les fédère désormais ?

Un doigt dressé, le majeur. Beaucoup portaient des cotons ouatés marqués d’un finger à François Legault. Des fois, un majeur dressé peut être poétique ; bien utilisé, il peut même friser le génie…

Mais des fois, c’est juste un manque de vocabulaire.

 

Admettons qu’il y ait des gens qui soient affublés d’un vêtement avec un finger dessus. Je ne comprends pas pourquoi tu généralises à tout le monde de la manif (« le symbole qui les fédère désormais ») ?

 

Je ne veux pas faire une énième chronique sur le conspirationnisme et ces fidèles enrôlés dans le culte de la « pandémie inventée » comme on s’enrôlait jadis en religion. Je veux parler d’éducation.

 

Je sais que tu n’as pas beaucoup d’éducation toi-même (un petit bacc en comm. de ‘91 à ‘95 genre ?), de toute façon c’est pas grave parce que j’ai déjà croisé des post-doc qui étaient absolument cons, donc je ne crois désormais plus que le parcours académique ait quoi que ce soit à voir avec ce pétillement d’intelligence dans les yeux, cette soif de vraiment connaître et de savoir, d’aller au fond des choses. Je suis convaincu que les autodidactes puissent exister. Je connais même des analphabètes qui ont une vision des choses vraiment très élaborée (la transmission orale demeure quelque chose de très efficace!). Enfin... sur ce point précis de la notion de « culte », je vais quand même essayer de t’éduquer un peu. J’ai justement avec moi un document intéressant, produit il y a quelques années par des départements de police, (dont des lieutenants, détectives, sergents, des PhD), disons un manuel à l’usage des corps de police. Dans ce document sont résumées les techniques de manipulation utilisées par les sectes (cultes), pour justement empêcher la pensée. Les voici :

-         les leaders du culte demandent une obéissance aveugle

-         l’isolation/confinement/retrait du reste de la société

-         la pression sociale des autres membres du culte (conformité sociale)

-         suppression de toute forme de vie privée

-         fatigue, privation de sommeil

-         communication subliminale : messages implantés en insistant sur certains « mots-clés » ou expressions récurrentes

-         jamais de questions

-         doctrine confuse et incohérente où les membres ne comprennent pas trop, ce qui encourage le renoncement à chercher une logique, donc conduit à l’obéissance aveugle

 

Enfin, cela sont les principales techniques, il y en a d’autres. Quand tu vois un « culte de la pandémie inventée », moi je vois des gens, à des degrés divers d’ailleurs, qui rejettent (disons comme Edgar Morin) certaines « affirmations officielles ». Par exemple, certaines personnes ont des questions sur les masques. Certaines en ont sur les tests PCR. Certaines autres en ont sur la pertinence du confinement ou du couvre-feu, à des degrés plus ou moins importants. Certains manifestants y vont sans masque, d’autres avec un masque parce qu’ils croient que ça les protègera. Certains veulent le masque mais pas le couvre-feu, etc. Certains sont « pro-choix ». La majorité de ces gens sont dans un processus de questionnement personnel, et cherchent leur bien et le bien du Québec. En effet, si le couvre-feu est inutile face au coronavirus, alors il faut vite l’abolir parce qu’il empiète sur nos droits les plus fondamentaux. C’est d’une urgence extrême ! Chaque soir dans la grande noirceur legauïste, pour presque tout le monde la porte de la prison-logement se ferme à une certaine heure, et ce, jusqu’à 5h du matin le lendemain. On ne déconne pas avec ce genre de chose ! Et, même chose pour les masques (sur les enfants maintenant !) et autres mesures. C’est pour ça que ces questions sont si importantes. On ne peut pas se permettre de gouverner au pif sur des mesures ayant des implications aussi fondamentales. La science doit avoir l’épaisseur d’un mur de béton armé, et sans conflits d’intérêts à part de ça. Les gens qui refusent de se poser des questions, selon le manuel des corps policiers, ce sont eux qui font partie de ceux qui répondent au critère : « pas de question » et « obéissance aveugle ».

 

Il y a au Québec quelque chose comme 50 % d’analphabètes fonctionnels. Des gens qui ont toutes sortes de difficultés à lire. Ça va de ne pas savoir lire du tout à ne pas comprendre le sens d’un texte moyennement complexe.

Vous me voyez venir ?

Je ne dis pas que tous les conspirationnistes ne savent pas lire. Je dis que les analphabètes sont surreprésentés dans leurs rangs. Pourquoi pensez-vous que ces gens-là multiplient les vidéos pour disséminer leurs sottises ?

Parce qu’ils écrivent au son, bien souvent.

 

Parce qu’aujourd’hui, Lagacé, une immense partie du « contenu », n’importe lequel, est proposé en format vidéo.

 

En passant, moi aussi ça m’avait frappé cette étude de 2011 qui avait donné lieu à des titres de journaux dans le style de celui du VOIR du 17 novembre 2011 : 

 

 

Bref, revenons à ta chronique.

 

Au-delà de leurs menaces et de leurs insultes, c’est ce qui fesse quand je lis les petites douceurs qu’ils font tomber dans ma messagerie, quand je tombe sur les statuts qu’ils relaient, leurs manifestes, leurs pancartes : cette incapacité à écrire deux mots qui se suivent sans fautes.

 

Bon, juste te dire que sur le net, les gens de tous les horizons ont parfois des problèmes de français. Ce n’est pas propre aux « conspirationnistes ». On n’a pas tous un réviseur ou un correcteur attitré non plus, sur le net. D’ailleurs, ce n’est pas parce qu’on fait des fautes qu’on est pour autant analphabète fonctionnel, ce qui se définit à peu près comme étant avoir mal à la tête après avoir lu une demi-page de texte, sans en saisir vraiment le sens. Je ne sais pas toi Lagacé si quand tu écris sans personne pour te relire, tu ne fais pas 240 fautes par phrase ?

 

Moins on est instruit, plus on croit aux théories du complot. C’est pas Bill Gates qui le dit, c’est pas Bill Gates qui me force à le dire : c’est l’évidence dans tout ce pan des études scientifiques sur les complotistes pondues par des chercheurs en psychologie et en sociologie… Bien avant la pandémie.

Je cite une étude de 2018, publiée dans l’European Journal of Social Psychology : « Plus le niveau d’instruction est élevé, moins la tendance à croire aux théories du complot est grande. »

Même son de cloche dans une étude de 2017, publiée dans Applied Cognitive Psychology : « Les effets de l’instruction sur les sentiments de maîtrise et d’impuissance ont vraisemblablement des impacts sur l’ouverture des gens aux théories du complot. »

Moins on est instruit, plus on croit aux théories du complot. Moins on est instruit, plus on peut être manipulé, berné, enfirouapé par des sornettes qui « sonnent vrai », érigées en business par des manipulateurs qui savent écrire, eux, même qu’ils ont parfois un doctorat, quand ce n’est pas deux.

 

Premièrement, je ne vois pas de sociologie dans tes deux études de psychologie, sociale à la limite. Il y a une immense différence entre les deux domaines d’étude, où la psychologie cherche plutôt des causes « dans l’individu » et la sociologie s’intéresse aux causes collectives, aux faits sociaux, bref, aux normes et institutions de la société. Elle est en cela plus critique que la psycho de tout le système dans son ensemble.

 

Deuxièmement, j’imagine que ton « étude » de 2018 est en fait un numéro du journal (European Journal of Social Psychology) intitulé Special Issue : Belief in Conspiracy Theories as a Social-Psychological Phenomenon, et que l’article principal de ce numéro est : « Belief in conspiracy theories : Basic principles of an emerging research domain[3] ». Intéressant « un domaine de recherche nouveau », tiens tiens. Donc tu disais « l’évidence dans tout ce pan des études »… d’un domaine nouveau… bien joué ! L’article de 2017, ça doit être celui-ci : « Why education predicts decreased belief in conspiracy theories[4] » dans Applied Cognitive Psychology, non ? Oui c’est ce que croyais.

 

Bon, l’affaire c’est que tes deux « études » ont été publiées par un seul et même gars, l’assez jeune chercheur néerlandais Jan-Willem van Prooijen, qui lorsqu’on va regarder son pedigree sur les sites d’université, a été financé par le NWO (acronyme très intéressant[5] !). Aussi, il semble un furieux guerrier de tout ce qui est à la mode actuellement : contre les méchants populistes, méchants complotistes, méchants racistes, méchants etc. Ce qui trahit ce genre de personnes, c’est leur côté caricatural « tout ou rien ». J’veux dire, ils sont incapables de reconnaître quoi que ce soit de bon dans ce qu’ils appellent eux-mêmes « la mouvance complotiste » ou « la mouvance populiste », et autres. Ils sont comme en croisade. En ce sens, d’absence de faire la part des choses et nuancer, ils sont dans une forme d’extrémisme eux-mêmes, des extrémistes du politiquement correct et de l’alignement « pro-gouvernemental ». N’importe qui de normalement constitué et honnête va rapidement les considérer, à cause de leur espèce de psychorigidité, comme étant des clowns et rien d’autre. Encore un cas style Rudy Reichstadt ou Tristan Mendès-France ou ces autres qui poussent comme des champignons après la pluie (de subventions gouvernementales) genre Martin Geoffroy, Marie-Ève Carignan, Gérald Bronner dont la seule et unique cassette est d’essayer d’expliquer le « complotisme » parce qu’untel a été brassé un peu trop fort dans son enfance ou autre psychologisation à deux balles, ce qui l’a amené à « la haine, la radicalisation et l’extrémisme violent ». Taaaaa-bar-nane. Ce n’est pas parce que j’ai subi ci ou ça dans mon enfance que ça change quoi que ce soit à l’objectivité même de, je prends un exemple parmi d’autres, la phrase de l’américain David Rockefeller dans ses mémoires publiées en 2002 :

 

Certains pensent que ma famille et moi-même faisons partie d’une cabale secrète travaillant contre les meilleurs intérêts des Etats-Unis, qualifiant ma famille et moi-même d’internationalistes et nous accusant de comploter avec d’autres autour du monde pour bâtir une structure politico-économique globale plus intégrée – un monde (‘one world’), si on veut. Si c’est l’accusation, je déclare que je suis coupable, et j’en suis fier [6]

 

Des phrases comme celle-là, il y en a des tas. Moi qui, pointant cet écrit, me positionne comme dénonciateur d’un comploteur avoué, en quoi cela se retournerait-il contre moi (de la part d’un journaliste qui normalement voudrait investiguer pour défendre le peuple) et dès lors je deviendrais moi-même non plus dénonciateur mais bien accusé d’être un méchant et dangereux « complotiste » ? Dangereux… pour QUI ? Cette phrase de Rockefeller est un aveu, objectif, publié. Les « débunkeurs » pourront retourner cette phrase de 30 000 façons pour l’amoindrir, la banaliser, mais elle reste univoque, limpide. (À le voir aller avec sa famille depuis des décennies, ça prenait pas la tête à Papineau pour s’en rendre compte de toute façon…) La question qu’on peut se poser, c’est comment ça se fait que dans mon cas cette phrase n’est pas tombée dans l’oreille d’un sourd, que je ne la balaie pas du revers de la main comme une banalité et que la vie continue comme si de rien n’était ? Que je veuille m’attarder à cette phrase en me disant que c’est peut-être éventuellement dangereux qu’un homme si riche, avec un réseau d’hommes puissants, dans ce qu’il dit être une cabale secrète, complote contre les meilleurs intérêts des Etats-Unis, le pays qui se situe à 45 minutes de char de chez moi, et qui, dit-on, lorsqu’il éternue ce pays, ici on pogne la grippe ? Et inversement, comment ça se fait qu’il y a des gens qui soient autant englués dans le sucre dégoulinant des émissions de télé-bonbon, de radio-bonbon et de tout ce la-la-land bonbon star-système titty-tainment, qui ne sachent même pas vraiment en fait qui est la famille Rockefeller ? Est-ce que je suis un dingue, ou suis-je peut-être alors quelqu’un qui se soucie plus que la moyenne des gens du sort de ce monde ? Suis-je un dingue, ou suis-je plus impliqué que le citoyen lambda (le citoyen moyen) ?

 

Probablement que je suis plus impliqué que le lambda, mais en même temps, dans le monde occidental, en France, une étude de l’Ifop a été publiée en 2018 donc récemment, qui faisait titrer un grand média français ceci : « Étude: 79% des Français croient au moins à une "théorie du complot" [7] », de l’Agence France-Presse (AFP) dans Le Point. Puis Le Devoir titrait en mai 2020 : « Près de la moitié des Canadiens dupés par des théories du complot sur la COVID-19 [8] » Près de 50 %, et ça, c’est juste pour la covid. Oui, il va falloir que tu l’acceptes Patrick, les humains ça se pose des questions. Leur flanquer l’étiquette de « conspirationniste » pour ça, ça y changera pas grand-chose, sauf juste pourrir le débat public puis tenter de marginaliser et bâillonner les libres penseurs et les contestataires, en fait, le propre des régimes totalitaires. Oups, au Québec on dit « dictature douce », c’est vrai…

 

Et pourtant, Legault lui-même il n’y a pas longtemps (le 13 février 2021) ne tarissait plus d’éloges sur la liberté d’expression, qui lui était si chère. Je vais t’en donner moi, de la liberté d’expression.

 

Tsé, moi aussi, je peux te sortir des études. C’est drôle parce que Jan-Willem Van Prooijen a collaboré dans un des deux articles que tu cites avec la britannique Karen Douglas. Elle a elle-même publié un article avec Michael J Wood en 2013 intitulé : « “What about building 7?” A social psychological study of online discussion of 9/11 conspiracy theories [9] » où elle a fait des observations disons intéressantes. Elle y a découvert que les “conspirationnistes” sont plus “sains d’esprit”, c’est-à-dire respectueux de leurs interlocuteurs, alors que ce qu’elle appelle les « conventionnalistes » (ceux qui sont contre les « complotistes ») sont plus hostiles.

 

L’abstract de ton étude de Van Prooijen de 2017 commence avec : « People with high education are less likely than people with low education to believe in conspiracy theories. It is yet unclear why these effects occur, however, as education predicts a range of cognitive, emotional, and social outcomes. » Van Prooijen se demande pourquoi ces effets arrivent, même s’il dit observer une corrélation. En tant que sociologue, j’ai vaguement 2-3 pistes d’hypothèse qui me viennent de mon cursus de sociologie… et du linguiste bien connu Noam Chomsky.

 

L’éducation en elle-même devrait être formatrice. Idéalement, elle devrait être un puit du savoir véritable, le moyen de l’accession aux vérités de l’univers, à un savoir solide, équilibré, servant à la formation de gens harmonieux ayant un bagage de connaissances variées et utiles (la fable de Marx sur l’homme qui peint le matin, philosophe à 11h, qui va pêcher à midi, qui s’entraîne à 2h et répare son véhicule à 4h, enfin cette idée de former un être complet aux savoirs variés). L’éducation devrait aussi apprendre à apprendre, c’est-à-dire permettre d’acquérir les outils pour savoir comment apprendre par soi-même dans l’avenir, sans l’aide d’un prof. C’est donc la pensée critique, ou le « cogito », étymologiquement : le doute, épistémologique. Donc : comment suis-je certain que ce que je crois savoir, que je crois vrai, je le sais vraiment ? Comment m’assurer que ce que je crois vrai est vrai ? Après tout c’est peut-être faux, et ce, même si plusieurs disent que c’est vrai ? C’est le doute cartésien. C’est ce qui fonde la raison logique : pour savoir que ceci est vrai, je devrai en faire la preuve démontrée. La démonstration. « La démarche. » Les étapes. Le protocole expérimental. C’est le fondement de la méthode scientifique.

 

Dans la vie et surtout en sciences, humaines de surcroît, il ne faut jamais confondre « ce qu’on aimerait qui soit », et « ce qui est ». C’est bien beau pérorer sur un beau système éducatif bien fait avec des beaux principes, mais il faut regarder la réalité en face. Le système d’éducation au Québec forme les jeunes à l’obéissance aveugle (« Je t’ai dit de faire ça, alors tu discutes pas et tu le fais, un point c’est tout. –Mais pourquoi ? –Y’a pas de pourquoi, fais-le. »), à s’habituer à la cadence de l’usine ou du bureau, avec une pause le matin, un dîner, une pause l’après-midi, le 9 à 5 du lundi au vendredi (pour les plus malchanceux, ça commence à l’âge de 6 mois à la garderie). C’est le rythme de la caserne militaire. On doit se tenir en rang, apprendre à obéir à une autorité hiérarchisée, en avoir peur même (d’aller chez le directeur). La matière, elle, est souvent tannante parce que répétitive (genre 8 cours de français sur 9 jours) ou enseignée par des profs qui n’y croient parfois même pas parce que ça vient d’un programme aseptisé du ministère dont ils n’ont pas grand-chose à dire. C’est souvent du par cœur, donc du remplissage. On apprend une matière pour l’unique raison de la revomir à l’examen, sans plus. Bon nombre d’étudiants oublient la plupart de ce qui leur est enseigné car ils n’y voient pas l’utilité. Normal, quand on demande aux profs ça sert à quoi, ils répondent souvent « apprends juste ça pour l’examen, c’est tout ce que je te demande. » Dans cette école, on y apprend à se lever de bonne heure (même si tellement d’ados arrivent super poqués le matin par manque chronique de sommeil [10] [11] [12]), l’obéissance, la soumission, la conformité, devenir un clone des autres, respecter des cases normalisées. C’est vrai, au secondaire, l’un des mots les plus polémiques, énigmatiques, qui faisait sourciller le plus les jeunes était le mot « normal », « normalité ». Qu’est-ce que ça pouvait bien vouloir dire ? Rares sont les profs, ils existent quand même encore, qui permettent aux étudiants une réelle exploration de la matière, répondent aux questions avec réel intérêt et osent aller au fond des choses. Ces profs-là nous marquent à vie, il y en a 3 ou 4 par secondaire, pas plus.

 

Hélas, ce qu’on appelle « éducation » peut être dévoyé. En effet l’éducation, d’une façon ou d’une autre, modèle l’individu un peu comme on modèle de la pâte à modeler. Autant on peut apprendre à un individu à justement questionner les cases (penser en-dehors de la boîte), autant on peut l’habituer à s’insérer dans des cases sans réfléchir. En sociologie et en histoire, on est très au courant que l’éducation (comme dans « camp de ré-éducation ») peut constituer une arme pour endoctriner un peuple, laver le cerveau d’un peuple, soumettre un peuple à plus ou moins forte intensité. On sait que l’éducation passe par l’école, mais elle passe aussi par les autres types de socialisation et de canaux de transmission de normes sociales : famille, espace public, travail, médias. On parle alors de l’influence des médias sur les représentations sociales des individus, de la socialisation au travail ou dans l’espace public. Oui, les médias « éduquent », eux aussi. Ils perpétuent des normes sociales, voire en favorisent certaines. (C’est la dichotomie « description ou prescription » en théorie des médias). C’est là qu’on entre dans la notion de propagande, d’ailleurs. Noam Chomsky le sait aussi.

 

Regarde ce qu’il en a à dire à la page suivante.

 

 

Ma traduction : « Souvenez-vous que les médias ont deux fonctions à la base. L'une d'elles est d'endoctriner l'élite, de s'assurer qu'ils ont les "bonnes" idées et qu'ils sachent comment servir le pouvoir. En fait, habituellement les élites sont les plus endoctrinées du corps social parce qu'elles sont celles qui sont les plus exposées à la propagande et prennent part aux processus de la prise de décision. Pour celles-ci, il y a le New York Times, le Washington Post, le Wall Street Journal Radio-Canada, La Presse, Le Devoir, LCN, etc. Mais autrement, il y a aussi les médias de masse dont la fonction principale est juste de se débarrasser du reste de la population - de les marginaliser et les éliminer, comme ça ils n'interfèrent pas avec la prise de décision. La presse qui remplit cette fonction n'est pas le New York Times ou le Washington Post Radio-Canada ou Le Devoir, mais plutôt les téléséries à la télévision, le National Enquirer Écho Vedettes, le sexe et la violence, les bébés à trois têtes, le football, bref ce genre de choses. »

 

Voir aussi un segment d’entretien très intéressant avec le philosophe Albert Jacquard en 1994 sur l’école. (www.youtube.com/watch?v=9v9updAv018)

 

Enfin, voici mes hypothèses pour Van Prooijen :

 

Je pose l’hypothèse que les gens qui ont une éducation supérieure ont un habitus similaire, tout comme les décrocheurs ont un habitus similaire. Cet habitus est peut-être mince, mais je pense qu’il est composé d’une volonté de contrôle ou de puissance, d’un caractère persévérant mais aussi conformiste. Je me dis dès lors qu’on est peut-être en face d’un problème de type l’œuf ou la poule. Qu’est-ce qui précède quoi ? Est-ce que les études forment un caractère qui veut être en contrôle, ou alors le caractère en contrôle est plus attiré par les études supérieures ?

 

Je pose l’hypothèse que les gens qui ont une éducation supérieure sont, comme Chomsky le note, plus endoctrinés que le restant de la société. Ils sont aussi souvent plus « spécialisés » dans un domaine, donc souvent assez ignorants des autres domaines académiques. Ils ont juste une immense foi en la science, en la technique, en le système de production industrielle.

 

Pour te donner un exemple d’endoctrinement universitaire (pour l’endoctrinement médiatique, Chomsky a déjà pas mal fait le travail), je te dirais simplement que dans n’importe quel cursus (programme), tu remarqueras que dans tous les syllabus (plans de cours), il y a à peu près toujours les mêmes auteurs, les mêmes bouquins en référence. La plupart des universitaires se font remplir le cerveau sans vraiment chercher à remettre en question le prof ; dépasser le prof. Chaque domaine académique a ses « stars », ses grandes dates historiques. Peu de sociologues relativisent Durkheim, Marx ou Weber. Ils se sont facilement fait convaincre que c’était les grands fondateurs de leur discipline, les grands noms à citer. Pourtant, ça reste une convention d’universitaires, ça se bouge, ça se questionne. Peu d’étudiants ont la capacité intellectuelle d’affronter ces questions, ils sont endoctrinés. C’est la même chose dans tous les domaines universitaires. Il y a une phrase d’ailleurs, malheureusement j’ai oublié de qui, dans un livre ou un film (je ne me souviens pas de tout hélas), qui a dit à peu près ceci « Je savais que vous étiez des sans-envergure parce que vous étiez encore à cet âge-là à l’université, à la place d’aller vous frotter à la vie et faire votre propre affaire. C’était le signe que vous étiez des suiveux, des vainement compétitifs dans le lichage. » En gros c’était à peu près ça. Ça m’avait un peu choqué parce que je me disais que j’étais quand même pas ça, même si j’en voyais des tout à fait comme ça autour de moi c’est vrai. Mais en fait c’est ça le truc avec l’éducation supérieure. J’y ai vu un nombre alarmant d’étudiants pratiquant une forme avancée de psittacisme [13].

 

Je me souviens au secondaire que j’étais passablement intéressé par les cours et je me suis demandé plus tard dans la vie ce qui a fait que moi je n’avais pas décroché alors que je connaissais des décrocheurs. Je me suis dit que c’était peut-être par conformisme, parce que je voulais tant avoir mon papier (diplôme), j’étais un bon petit soldat dans le rang. Je ne voulais pas faire de la peine à mes parents. Je voulais m’ouvrir des portes… Mais souvent ce n’est pas parce que je voulais être là. J’y allais souvent à reculons. Et plus les études ont avancé, plus le choix de faire autre chose était possible. Pourtant j’ai continué longtemps à l’université. Je voulais vraiment aiguiser mon esprit, apprendre à lire profondément, écrire profondément, penser profondément, devenir un as là-dedans. Mais je sais que j’ai vu beaucoup, beaucoup d’endoctrinement autour de moi, ce qui a beaucoup amoindri l’estime que j’avais pour l’ « institution universitaire ». J’ai aussi vu des gens accrocs aux subventions qui sont devenus en quelque sorte les bons petits toutous des diktats des organismes subventionnaires, genre flairer « la tendance du moment » et l’inclure d’une façon ou d’une autre dans ses recherches. (« Faut faire ci ou faire ça, dire ci ou ça, pour avoir une grosse subvention. »)

 

Pour en revenir sur ma réponse à Van Prooijen quant aux hypothèses qui font que l’éducation supérieure est souvent moins prompte au « complotisme » : c’est vrai, logiquement, quelqu’un qui évolue dans une société dans laquelle il fait partie des « privilégiés » (salaire) aura mécaniquement plus tendance à ne pas chercher à remettre en question l’ordre établi parce que pour lui, ça marche bien, niveau matériel en tout cas.

 

De plus, quelqu’un qui travaille disons pour le gouvernement ou est subventionné directement par le gouvernement à des gros montants (les chaires universitaires, les fonctionnaires, les médias par exemple), est objectivement en conflit d’intérêts, et aura plutôt tendance à ne pas vouloir voir les malversations, les pratiques louches, les enveloppes brunes, ou les choses encore pires que ça, bref, tout ce qu’on peut appeler des petits ou des gros complots, au Québec ; de la magouille. On ne tue pas la vache à lait. C’est-à-dire qu’on l’a vu, ceux qui divergent un peu trop de « la ligne de parti » dans les médias ou les universités, ils sont soit « tablettés » ou alors ils sont carrément remerciés. On ne peut pas tout dire, tout sérieusement questionner dans les grands médias actuellement. Et la « fenêtre du pensable » n’a fait que se rétrécir depuis les 15 dernières années. Et la « colonie artistique médiatique » ne bronche pas vraiment, s’y « adapte ». Je peux juste me dire qu’elle marche drette pour pas perdre ses (gros) privilèges.

 

« Un doctorat, quand ce n’est pas deux », référence évidente à Alexis Cossette-Trudel avec Radio-Québec[14], ayant fait un doctorat en science politique puis un autre doctorat (pas terminé) en sémiologie, notamment sur les sujets de guerre de l’information, ayant été un temps à la Chaire Raoul-Dandurand, ayant côtoyé toute la ribambelle. Le style de ses webjournaux est toujours le même : présenter ses sources au fur à mesure qu’il parle. Après, on a toujours le droit d’être d’accord avec un point ou un sujet, en désaccord avec un autre. Après tout c’est ça la liberté de penser.

 

Moins on est instruit, plus on est pauvre. Plus on est pauvre, moins on a de dents. Plus vous regardez de vidéos de conspirationnistes, plus vous voyez de gens édentés.

 

Ça m’avait troublé, en début d’année, quand deux conspirationnistes s’étaient filmés menaçant Jean-René Dufort : l’un d’eux avait plus de trous que de dents dans la bouche.

 

Voici ce qu’on pouvait lire sur le site de Radio-Canada le 25 mai 2018 :

« Selon l'Institut de recherche et d'information socio-économiques (IRIS), 27 % des Québécois se sont privés de soins dentaires en 2016 en raison des coûts. Il s'agit d'une hausse de 10 % par rapport à 2013 [15]. » L’IRIS, ça te parle ?

 

Plus d’une 1 personne sur 4 n’a pas accès à des soins dentaires parce que les soins dentaires coûtent trop cher, et que donc seulement les riches et la classe moyenne disons « aisée » peuvent se les permettre ? On parle de plus de 2 millions de personnes qui ne peuvent pas aller chez le dentiste.

 

Selon Statistique Canada, début 2020, il y avait 812 000 Québécois en situation de pauvreté. Par contre :

 

« selon la même étude [de Stat Can], les ménages de la Belle Province disposent de 53 200$ après impôts, un montant bien inférieur à la moyenne canadienne fixée à 61 400$ par ménage. Seule la Nouvelle-Écosse, avec des revenus après impôts de 52 200$ par ménage, fait pire que le Québec[16]. »

 

Cette situation est inacceptable, mais on constate qu’il y a énormément de gens au Québec qui ne sont pas officiellement « pauvres » et qui sont « édentés », pour reprendre ta terminologie. Ça fait beaucoup d’« édentés », tu en as peut-être même dans ta famille proche, ou tes amis. T’y es-tu intéressé ?

 

Parlant de dents ou de leur absence, ça m’a fait penser au Temps des Bouffons du regretté Pierre Falardeau, grande gueule qui nous manque beaucoup trop depuis déjà une décennie dans ce paysage médiatique aseptisé et devenu simplet. Sur les dents, il en avait lui aussi à redire :

 

Toute la rapace est là : des boss pis des femmes de boss, des barons de la finance, des rois de la pizza congelée, des mafiosos de l’immobilier. Toute la gang des bienfaiteurs de l’humanité. Des charognes à qui on élève des monuments, des profiteurs qui passent pour des philanthropes, des pauvres types amis du régime déguisés en sénateurs séniles, des bonnes femmes au cul trop serré, des petites plottes qui sucent pour monter jusqu’au top, des journalistes rampants habillés en éditorialistes serviles, des avocats véreux, costumés en juges à 100 000 dollars par année, des lèche-culs qui se prennent pour des artistes. Toute la gang est là : un beau ramassis d’insignifiants chromés, médaillés, cravatés, vulgaires et grossiers avec leurs costumes chics et leurs bijoux de luxe. Ils puent le parfum cher. Sont riches pis sont beaux ; affreusement beaux avec leurs dents affreusement blanches pis leur peau affreusement rose. Et ils fêtent[17]

 

Toi aussi tu as les dents vraiment très blanches, non, Patrick ?

 

Je ne souligne pas les béances dans le sourire de ces gens-là pour les rabaisser. Je le souligne pour parler d’autre chose : d’humiliation.

Quand on pense à « pauvreté », on pense à manque de fric, bien sûr. C’est une constante quête pour payer le nécessaire, une préoccupation urgente, omniprésente. Et il tombe sous le sens que l’urgence va te pousser à acheter de la bouffe avant de penser à soigner les dents qui permettent de manger.

Mais c’est aussi une pauvreté de l’esprit, bien souvent. De curiosité, de culture, de liens, de compréhension. Tu manques de tout. Mais tu ne manques généralement pas d’humiliations, quand tu es pauvre. En plus de faire des jobs qui te tuent à petit feu, tu le sais bien que le reste du monde les voit, les trous dans ta bouche…

Ta place, dans la société, c’est de faire de la figuration. Les petits boulots dont personne ne veut, à des salaires minables pour des gens qui ne te voient pas.

T’es en marge de la société.

 

« Pauvreté d’esprit […] de curiosité, de culture, de liens, de compréhension. » Entretiens-tu personnellement des relations sociales avec des personnes vraiment pauvres ? Comme de vrais amis je parle ? Payes-tu souvent, dans un geste parfaitement gratuit, un café à un itinérant, t’asseoir et jaser avec une bonne heure ? Ou est-ce que la pauvreté demeure pour toi un concept, une abstraction, une statistique ? Un de mes bons amis est un « pauvre de longue date ». Son parcours de vie, son milieu familial pas propice, ont fait qu’il s’est retrouvé là où il s’est retrouvé. Workaholic jusqu’à vers 40 ans, il a fait une maladie et n’a pas pu rembarquer. Il a été BS pendant des décennies. C’est un homme très cultivé, qui lit beaucoup, et qui s’il avait eu le milieu familial propice, serait devenu professeur d’histoire. Chez eux, lorsqu’il y avait plus de 4-5 livres, on lui disait de s’en débarrasser. Ça, c’est le sommet de l’iceberg. Je ne parlerai pas du reste parce que c’est sa vie privée. Je peux juste dire qu’aujourd’hui, il a des milliers de livres chez lui, achetés, reçus en cadeau, trouvés à gauche à droite.

 

J’ai déjà parlé une bonne heure avec un itinérant. C’était un vieux monsieur à la barbe blanche, comme un père Noël, très sympathique. Il avait été directeur d’école dans sa vie, puis me parlait comme un protecteur des autres itinérants, un veilleur. J’étais le petit étudiant de bacc. tout propre qui était pétri de malaise et aussi d’ouverture. Avait-il été directeur d’école ? Je n’avais pas senti de mythomanie chez cet homme.

 

C’est grâce à ces rencontres chanceuses que j’ai pu découvrir que tous les gens ont une histoire et que leur apparence qu’on croit apercevoir quand on les croise n’a vraiment souvent rien à voir avec leur parcours de vie.

 

Dans la classe moyenne et parmi les riches (oui j’en ai connu, j’en connais encore d’ailleurs), je suis tombé sur des vrais caves aussi. Des gens qui n’ont aucune culture, aucune finesse ni curiosité, qui ne font pas de lien et ne comprennent rien, ne font qu’obéir. J’ai aussi croisé des gens qui ne pensaient qu’à l’argent, sans fin. Comment en faire encore plus, en placer, en investir, en dépenser. Au moins, avec les pauvres, on n’a pas cette grave maladie-là, de l’argent.

 

« Mais tu ne manques généralement pas d’humiliations, quand tu es pauvre. »

Là je ne vais te répondre que pour moi-même. Je veux dire que s’il y a d’autres pauvres qui eux vivent une humiliation constante, je ne parlerai pas pour eux. « Les personnes fausses ont une image à maintenir. Les personnes vraies s’en foutent complètement. » Ça fait quelques années que je suis sur le vrai BS, après mes longues études universitaires (c’était une forme d’un un peu plus gros BS qui s’appelait l’AFE à ce moment-là de ma vie). Ce que j’essaye de dire, c’est que l’humiliation est un ressenti qui vient de l’intérieur de nous, de notre façon de réagir au monde, de nos normes intériorisées. Quand j’étais ado, les rares fois que j’allais au Village des valeurs dans le temps de l’Halloween, je trouvais que c’était un repère de pauvres. En fait c’est pas « moi » qui trouvait ça, mon milieu social (mes proches ou alors les médias et l’école) m’avait inculqué ça. J’ai pu faire la part des choses avec le temps et comprendre que c’était juste stupide comme idée, alors je m’en suis débarrassé. Ma seule difficulté d’aller au Village des valeurs maintenant, c’est que je sais que c’est une multinationale et je n’aime pas beaucoup ça. Autrement, pour la réutilisation et la revalorisation, je trouve ça génial pour l’environnement, et personnellement, j’aime mieux les choses vintage. Je veux dire, y me tomberait un million de dollars dessus, je voudrais pas de télé 4K, tu me saisis ? À ’place, spontanément, j’irais faire le tour du centre-ville pour aller distribuer des 20 piasses aux itinérants 2-3 fois par semaine.

 

Tu dois te demander pourquoi un gars qui a un diplôme de maîtrise est sur le BS ?

 

« Pourrir au fond est mieux que de vivre comme un idiot/un faux-jeton/un hypocrite. » (“Rotting at the bottom is better than living as a fool”, -Propaghandi) J’aime mieux être pauvre et intègre dans mes convictions, que me marcher dessus chaque jour, me mentir à moi-même en proférant des choses que je ne pense pas, et avoir un gros salaire en contrepartie. Pour l’instant (je ne dis pas que ça va pas changer un jour), je n’ai pas trouvé cette place rémunérée qui me permet de dire ce que je veux, de faire les recherches que je veux vraiment, sans me piler dessus, sur moi et mon intégrité. Je ne suis peut-être pas payé, mais je continue à travailler fort et librement sur mes sujets de recherche universitaire.

 

L’ONG ATD Quart Monde qui est un mouvement qui veut s’attaquer aux causes de la pauvreté, explique dans un document datant de 2015 environ intitulé « En finir avec les idées fausses sur la pauvreté[18] » : Sur 10 personnes en situation de pauvreté (~19 000$ et moins par année) : 4 ont un travail rémunéré, 5 ne sont pas en situation de travailler (35% sont retraitées, 15% ont une contrainte comme handicap, maladie, jeune enfant à charge), puis 1 personne sur 10 est exclue par le marché du travail (moi !). Ces 1 personne sur 10 représentent 8% des personnes en situation de pauvreté qui n’ont pas de « contrainte à l’emploi » (donc pas handicapés malades ou de jeune enfant). La réalité est que le retour au travail est une course à obstacles : qualification ou expérience pas précisément celle qui est recherchée, discrimination à l’embauche, mauvaise santé, etc. ATD Quart Monde cite Statistique Canada qui dit que la valeur du travail non salarié, donc le bénévolat (plusieurs pauvres font du bénévolat, c’est une façon de rester actif et de socialiser), les proche-aidants, les personnes au foyer, cela représente un tiers du PIB (235 milliards par année). C’est faux de dire qu’on vit bien sur le BS. Selon ATD Quart Monde citant l’IRIS, en l’an 2000, l’aide sociale couvrait 60% des besoins minimum. En 2010, elle ne couvrait plus que 49 % des besoins minimum.

 

Avec tout ce qui se passe depuis mars 2020 et même depuis 2010, alors qu’on avait appris récemment (avant la pandémie) que le coût du logement avait bondi de 40 % depuis ~2015, et que ça a encore augmenté avec la pandémie, je peux sans trop me tromper dire que le 49 % de 2010 a fondu encore davantage. (Stat provenant d’une entrevue Radio-Canada, 25 juin 2020 : https://youtu.be/nCDxjdJ3R_Q?t=57)

 

Pourtant, le nombre de personnes seules à l’assistance sociale est resté le même. Pour une personne seule, le BS c’est environ 9 000 $ par année (750 $ par mois, ou environ 190 $ par semaine, loyer-hydro-bouffe pas payé). La mesure du panier de consommation (MPC) qui fixe donc ce qu’on appelle les « besoins minimum », ou besoins de base, indice développé par Statistique Canada, est d’environ le double (~19 000 $) et c’est ça le seuil de pauvreté au Canada. En gros, la MPC, c’est ce qu’on considère le montant nécessaire à ce que les gens se procurent « le minimum vital », le strict minimum… Les BS sont à 50 % du minimum vital. Logiquement, on les fait donc consciemment crever tranquillement, parce que personne ne peut survivre avec la moitié du minimum que ça prend pour vivre, c’est juste logique. D’ailleurs, entre les quartiers pauvres et riches de Montréal, il y a une différence de 11 ans en espérance de vie.

 

« Faire des jobs qui te tuent à petit feu. […] Ta place dans la société c’est de faire de la figuration. […] Les petits boulots dont personne ne veut, à des salaires minables pour des gens qui ne te voient pas. » Imagine dire des affaires de même. T’es en train de parler de tous ceux qui travaillent au salaire minimum pour les multinationales avec des PDG qui gagnent plus que 50 000$ par jour. T’es en train de parler de tous ceux qui travaillent au salaire minimum que tu croises quand tu passes à la caisse à l’épicerie, quand tu te fais emballer ta commande. Tu parles des commis que tu croises quand tu payes ton gaz, quand tu vas chercher tes pilules. Tu parles de tellement de gens payés 13,10$ de l’heure, ou quelques grenailles de plus. À moins que tu aies quelqu’un qui va faire tes courses pour toi ? Selon le gouvernement du Québec, le salaire minimum concerne 287 000 personnes à 13,10$ l’heure au Québec, mais encore beaucoup plus que ça qui touchent un salaire qui oscille autour de ce taux (13-14-15$ de l’heure).

 

Penses-tu que la madame qui a une "bullshit job" style « bore-out »[19], payée 75 000$ par année, dans une tour à bureau qui haït ce qu’elle fait depuis les derniers 15 ans, qui n’est pas capable de sentir sa supérieure et ses réquisitions stupides, et qui sait que c’est réciproque, qui se tape le trafic le matin et le soir, penses-tu que ça ne la tue pas à petit feu ? Penses-tu qu’elle n’a pas le feeling de faire de la figuration aussi ? Qui ne fait pas de la figuration ? C’est quoi cette façon de voir le monde ? Il y aurait les acteurs principaux ? Qui sont-ils ? Patrick Lagacé ? Les banquiers ? Les cadres ? Les politiciens ? Ce ne sont sûrement pas les gars de construction, les mécaniciens, les travailleurs dans les usines, les coiffeuses, les infirmières, les profs… ?

 

Que sait-on des groupes marginalisés dans la mécanique complotiste ? Je cite l’étude de 2017, encore : « Les groupes marginalisés de la société ont tendance à présumer que leur situation est le fruit de conspirations. »

 

Ce n’est donc pas une chronique sur le conspirationnisme. C’est une chronique sur les inégalités.

Je tiens pour une évidence, après un an à le voir aller, que le conspirationnisme est un résultat des inégalités dans la société.

 

C’est une énième chronique sur un thème qui m’est cher depuis des années, à savoir que l’éducation n’est pas qu’un « dossier », c’est un enjeu vital, existentiel. L’école doit former des citoyens, leur donner des outils pour comprendre le monde, toute leur vie.

C’est un échec social, ces milliers de Québécois complotistes. C’est un problème de santé publique, aussi, sachant à quel point complotisme et réticence vaccinale sont statistiquement cousins.

 

« Échec social, ces milliers de Québécois complotistes. » Ce qui est un échec social, c’est l’incapacité de certains comme toi de considérer ces gens comme des citoyens qui ont des divergences d’opinion, qui refusent la pensée unique, qui ont une position plus ou moins contestataire, plus ou moins en porte-à-faux avec le message gouvernemental, les multinationales, les médias. Pour que ce soit une réussite sociale, c’est quoi, faudrait que 100% des Québécois marchent au pas derrière Legault ? Qu’ils soient parfaitement « pro-masque, pro-vaccin, pro-confinement, pro-couvre-feu » ? Es-tu devenu fou câliss ?

 

« Réticence vaccinale. » Imagine si les compagnies pharmaceutiques étaient les compagnies les plus rentables du monde ? Imagine si même des profs (très timides) de sociologie de la santé allaient jusqu’à admettre que si une pharma a à choisir entre ta santé et sa marge de profit, elle n’hésitera pas deux secondes pour sa marge de profit ? Imagine si un nombre non-négligeable de familles sont convaincues que leur enfant a été heurté par un vaccin ? Imagine si l’autisme est une épidémie exponentielle ces dernières décennies et que certaines personnes ont cru voir un rapprochement entre certains vaccins et la maladie ? D’autres aussi ont fait un lien entre autisme et microbiote. Bref, imagine si c’est peut-être important de ne pas ériger les vaccins comme un nouveau veau d’or et n’y voir que des points positifs, et pas de problème possible ? Imagine si tout était plus complexe que des catégories noir/blanc (100% pour, 100% contre) et qu’il y avait des nuances ?

 

Je les regarde aller, les complotistes. Ils ont marché dans les rues de Montréal, samedi. Ils étaient des milliers. Toute leur vie, ils ont été invisibles, en marge…

 

« Des milliers ». C’est drôle, savais-tu qu’en marketing corpo (vu que c’est un gouvernement de comptables ça devrait leur parler ce genre de langage-là), le département des plaintes pense qu’un client qui a vraiment pris le temps d’aller au bout du processus de plainte représente à peu près 1 000 clients qui auraient pensé faire une plainte mais qui ne l’ont pas fait pour x ou y raison ? Si une logique similaire s’applique aux manifestants qui se « plaignent » du gouvernement, alors ceux qui ont pris le temps et l’énergie de se rassembler à Montréal représenteraient plusieurs millions. Moi-même j’ai honte de ne pas m’être présenté à la manif même si j’étais avec eux de tout cœur, parce que je suis absolument en désaccord avec les mesures incohérentes et surtout sans justification-béton du gouvernement, lui qui joue avec nos vies beaucoup trop à la légère sans que grand monde de la « colonie artistique médiatique » ne s’en émeuve. J’irai à des manifs, en espérant y voir le Québec en entier.

 

« En marge ». Tu connais bien mal ces gens qui manifestent. Si tu allais voir un peu, tu verrais qu’il y a des gens de tous les horizons sociaux, pas que des « pauvres » et « marginaux ». Il y a des gens qui font des bons salaires, il y a même des petites familles. Pourquoi veux-tu tellement faire l’amalgame entre « complotisme » et « en marge » de la société ?

 

Et là, depuis un an, ils se fédèrent.

Ils font suer, ils disent des sottises, ils n’ont qu’un pouvoir de nuisance, mais c’est un pouvoir quand même, la nuisance, c’est immense quand on n’a jamais existé. Quand ils bloquent un tunnel, quand ils envoient paître des savants qui ont consacré leur vie à la science, ces diplômés de l’Université de la Vie ne sont soudainement plus des laissés-pour-compte invisibles…

Ils comptent.

 

J’avoue que j’avais déjà entendu le mot « exclu », « marginal », mais on n’avait encore jamais remis en question mon existence elle-même. N’avoir jamais existé, qu’est-ce que ça veut encore dire ça ? On dirait une vieille star has been nostalgique qui parle !

 

« Quand ils envoient paître des savants qui ont consacré leur vie à la science ». Bon, assez !!! La majorité des « conspirationnistes » que je connais respectent beaucoup la science, seulement, c’est pas les mêmes scientifiques. Ils ont aucun respect pour Anthony Fauci, mais ils respectent beaucoup :

-         le Professeur Didier Raoult, virologue infectiologue,

-         le Dr. Louis Fouché, anesthésiste-réanimateur,

-         le Dr. Laurent Toubiana,

-         le Dr. Luc Montagnier, virologue et prix Nobel,

-         le Dr. John Ioannidis, épidémiologiste,

-         le Dr. Sucharit Bhakdi, microbiologiste,

-         le Dr. Michael Yeadon, ancien vice-président chez Pfizer,

-         le Dr. Wolfgang Wodarg, épidémiologiste allemand et ex-président de la sous-commission de la Santé du Conseil de l'Europe,

-         la Dr. Dolores Cahill, chercheure experte en biologie des protéines

-         le Dr. Christian Perronne, infectiologue

 

Et j’en passe, il y en a un nombre incalculable ! Ce sont tous des scientifiques, dont plusieurs savants qui ont consacré leur vie à la science. Arrête de verser dans les âneries fake-niouzesques.

 

Avant de finir, pour en revenir sur les pauvres. J’ai fait un petit calcul à partir de quelques données, premièrement de l’Enquête 2020 sur la population active pour le Québec (Institut de la statistique du Québec[20]) où il est dit qu’il y a une population active de 4,6 millions de Québécois. Sur cette pop. active, le salaire moyen hebdomadaire est d’environ 28$ de l’heure (1000$ par semaine). Le « 1% » au Québec ça représente 85 000 personnes environ. Pour faire partie du 1% au Québec, il suffit de faire au-dessus de ~200 000$ par année, à peu près. L’IRIS a titré le 4 novembre 2020 : « Le Québec peut couvrir les besoins de tout le monde mais choisit plutôt d’enrichir les mieux nantis ». Voici ce qu’ils disent :

 

« Alors qu’au bas de l’échelle sociale, des gens ne disposent que de la moitié des revenus nécessaires pour combler leurs besoins de base selon la MPC, tout au sommet, d’autres disposent de revenus permettant de les combler neuf fois. Pourtant, entre 2016 et 2017, une simple modération de la croissance du niveau de vie des ménages au-delà de ce seuil aurait suffi à dégager les moyens nécessaires pour combler le déficit de couverture des besoins de base qui subsiste au Québec. Nos choix collectifs en matière de travail, de programmes sociaux et de fiscalité en auront décidé autrement. »

 

As-tu bien compris le sens de cette phrase ? C’est-à-dire que le chercheur qui écrit n’a pas dit qu’il aurait fallu ôter quelque chose que les plus riches avaient déjà. Il aurait juste fallu empêcher qu’ils s’enrichissent encore toujours plus, mais juste un peu moins vite, pour remonter tout le monde en haut de 20 000$ par année (~la MPC). C’est pas fou-braque ça ?

 

En fait de choix collectifs, c’est vrai qu’on a décidé d’offrir une deuxième piscine creusée aux plus riches (ou un gros VUS de l’année, ou une Apple Watch et le gros iPhone de l’année, ou un char neuf pour la fête de son ado de 16 ans) à la place d’offrir des dents aux « édentés » et un petit appart aux itinérants. C’est un choix de société comme un autre. C’est juste que pour quand même un bon nombre, ça passe vraiment, vraiment très, très, très mal dans gorge…

 

Autre chose, à part les dents… les gens trouvent que c’est ben la fin du monde depuis quelques mois d’être en confinement et sans activités, loisirs, parce qu’à peu près tout est fermé. (Oui c’est grave ce qui se passe depuis quelques mois - les mesures, mais c’est pas ça le point de ce paragraphe.)  J’aimerais vraiment que les gens prennent le temps, profondément, de se rendre compte de ceci : avez-vous réalisé qu’il y a des pauvres qui vivent ce « confinement » depuis des années, des décennies, parce qu’ils n’ont pas les sous pour y aller ? Pas juste quelques mois : des décennies.

 

Et pendant qu’on lit des affaires de même, y a encore du monde qui dort dans la rue, chaque soir. Toi et tes copains du 1%, magnez-vous le derrière bordel. Foutez la pression en parlant de ces réalités, chaque semaine, dans vos torchons !

 

Le 18 septembre 2020, la mairesse Valérie Plante sortait dans les médias pour dire que le nombre d’itinérants tournant autour de 3000 à Montréal ces dernières années avait augmenté à cause de la pandémie à 6000 cette année. Essentiellement à cause d’évictions pour non-paiement de loyer, d’une « crise du logement » et bien sûr de manque de moyens financiers des pauvres (ça va s’accentuant depuis 20 ans). Une chance que « le 13 décembre 2002, l’Assemblée nationale du Québec adoptait à l’unanimité et avec un certain enthousiasme une loi visant à lutter contre la pauvreté et l’exclusion sociale[21] » ! Et une chance que le groupe à la base de ce projet s’appelait « le Collectif pour une loi sur l’élimination de la pauvreté[22] ». Non seulement la pauvreté n’a pas été éliminée, mais elle a empiré tabarnak. J’veux pas voir ça aurait été quoi sans une loi pour l’élimination de la pauvreté.

 

J’en suis venu à cette conclusion : si chacune des 4,6 millions de personnes composant la population active québécoise donnait 2 dollars par mois (24$ par année), on pourrait donner 18 400 $ de plus par année à ces 6 000 itinérants, comme ça, d’un seul coup. Y aurait pu d’itinérance au Québec… pour un début c’est un début.

 

En conclusion, même si j’ai trouvé que ton texte était comme un coup de poing sua gueule, parce que tu as sorti toutes sortes d’immondices sur la pauvreté[23], les gens qui se posent des questions, et une espèce de vision tordue de ce que c’est que d’exister, et d’avoir une place dans la société, je ne fais pas partie de ces « wokes » qui veulent « canceller » le monde. Tu as tout à fait le droit de t’exprimer comme tu le sens. Moi, je tenais à répondre à tes idées. J’espère ce faisant au moins susciter un début de questionnement dans ton esprit. Et si jamais tu te rends compte que ta job te fait faire, ou te fait dire des choses que tu ne penses plus, aie le courage de sacrer ton camp loin, en campagne ou j’sais pas. Ce que je vous souhaite, les journalistes et chroniqueurs, c’est vraiment d’avoir les couilles de vous mettre ensemble, faire un mouvement collectif et mettre votre pied à terre. Dire que la crise des médias c’est assez, la convergence des médias c’est assez, et que vous accepterez plus de vous faire maltraiter de même par les gouvernements et les grosses corporations qui vous possèdent (dans des « environnements toxiques [24] [25] »).

 

Je suis conscient que tu es certainement dans le 1% au Québec (avec la presse, les deux hommes en or, la job à la radio, les francs-tireurs, etc.) et que moi, touchant même pas 10 000$ par année, je fais partie des plus pauvres des pauvres. On n’a conséquemment absolument pas du tout la même vision sur la vie et sur la société. Je pense que ça se sent dans ce texte.

 

J’voulais juste donner mon two-cent sur le « complotisme » et ton torchon. Je pense que tu as tout faux. Je pense qu’une des techniques de manipulation des médias pour endormir le poisson (le public captif), c’est des informations et des divertissements flattant toujours l’émotionnel (sensationnel), l’instinctif, et surtout l’égo du spectateur. Lui faire croire qu’il est tellement plus intelligent de regarder ce média que ceux qui ne le font pas. Que lui, il a tout compris. Bah, on ferait la même chose chez un concessionnaire, t’es tellement plus hot de conduire notre marque de char. De ce point de vue-là ça m’étonne pas. Enfin, ce qui me conforte dans l’idée qu’une bonne partie des « complotistes » sont pas mal plus au courant que le public captif des médias, c’est la connaissance des faits. Je suis certain qu’une plus grande partie des « complotistes » savent que les tests sont des tests PCR, et peuvent expliquer en gros le principe des cycles d’amplification des acides nucléiques, et le « cycle treshold » en-bas duquel ou en-haut duquel il commence à y avoir… des problèmes. Tu vois, je pense que la vieille rangaine qui consiste à dire que les « complotistes » sont : stupides, extrêmes, méchants, fous, analphabètes, c’est juste une énième propagande pourrie pour surtout, surtout, garder le public captif, captif.

 

Étant donné que je suis un nuisant qui n’existe pas, bientôt édenté et analphabète, je ne vais pas signer mon texte. Tu vois, j’ai un peu parsemé mon texte d’écriture-au-son, ça-et-là pour te faire plaisir. Contrairement à toi, je ne toucherai pas une maudite cenne pour avoir écrit ce texte. Je vais encore me demander comment je payerai mon loyer de ce mois-ci et du mois prochain. C’est correct. Contrairement à toi, sauf avec un genre de miracle viral, mon texte ne sera pas médiatisé au grand nombre. Il n’en demeure pas moins important je pense. Contrairement à toi aussi, je n’aspire pas du tout à avoir une notoriété publique. Rester dans l’ombre comme tu dis, ça me va très bien. Je n’ai aucune envie de passer à Tout le monde en parle comme tu le fais si souvent, ou sur quelque autre plateau télé, radio, journaux. Par contre, ce que je veux, c’est que les gens de la grande agora citoyenne québécoise qui partagent mes idées soient représentés dans le discours public. C’est tout.

 

Je ne m’attends pas à une réponse constructive de ta part. Si jamais réponse il y a, ce sera probablement insultant, simple, peut-être vicieux voire violent.

 

 

Une phrase du journal L’itinéraire m’avait marqué il y a 10 ans, par quelqu’un qui a été élevé toute sa vie sur une ferme, est arrivé en ville et est tombé dans la pauvreté, l’itinérance, la prostitution : « J’ai beau voir les choses positivement et me dire que je suis un être humain utile à la société, il y a certains regards des autres qui me restent pris au travers de la gorge. » Fais quand même attention quand tu écris tes conneries, des pauvres et des « conspirationnistes » te lisent (lisaient ?) aussi.

 

 

J’te laisse quand même avec une phrase dont avait le secret Falardeau : « Que des petits journalistes merdeux payés par Power Corporation ou Radio-Cadenas fassent de sales jobs à des gens comme Bourgault, Parizeau, ou Yves Michaud, rien de plus normal. On ne peut pas reprocher à des bêtes puantes de sentir mauvais. (...) Arrêtons d’exécuter nous-mêmes nos camarades de combat sous la pression de nos ennemis. Arrêtons d’intérioriser la pensée de ceux qui ne cherchent qu’à nous diviser pour mieux nous détruire. » -Pierre FALARDEAU, Le Québécois, 2004

 

(T’inquiète… j’ai beaucoup de respect pour certains journalistes, chroniqueurs ou intervenants dans les médias, genre Bazzo, feu Jacques Languirand, Micheline Lanctôt, même Stéphan Bureau, pour n’en nommer que quelques-uns.)

 

 

Parlant d'édentés. J'ai mille fois plus de respect pour quelqu'un qui a pu de dents que pour quelqu'un qui a pu d'âme.

Tiens-toi le pour dit.

 

 

 

 

Bonus en histoire américaine du XXème siècle :

 

Savais-tu que la CIA s’est intéressée en 1967 à la notion de « conspiracy theorist » (« conspirationniste ») dans un mémo (le document 1035-960 intitulé « Concerning Criticism of the Warren Report ») ? Certains attribuent même à ce document l’origine de l’utilisation de ces mots-étiquettes (« conspiracy theorist ») dans le but de discréditer d’emblée un adversaire intellectuel sans avoir à répondre franchement à ses arguments [26]. C’était 4 ans après l’assassinat du président des États-Unis John F. Kennedy, alors que ce document a été rendu public en 1976-1977 grâce au Freedom of Information Act dans le New York Times (journal qui a bien changé depuis) dans un article : « Cable Sought to Discredit Critics of Warren Report [27] ». Dans ce mémo, la CIA explique que des « "théoriciens de la conspiration" ont souvent émis des suspicions quant aux activités de la CIA ». Elle propose aussi les actions à entreprendre pour discréditer les critiques de la Commission Warren (d’enquête sur l’assassinat de JFK). Parmi ces actions :

-         « Ne pas initier de discussion sur la Commission. »

Lorsqu’une discussion est déjà initiée quelque part :

-         « Discuter du problème de médiatisation avec les contacts amis faisant partie de l’élite politique et médiatique en réitérant que l’enquête a été faite jusqu’au bout, que les accusations des critiques sont sans fondements, que toute discussion supplémentaire ne fait que le jeu de l’opposition, que ces discussions émanent de propagandistes communistes. Inciter les amis de l’élite politique et médiatique à utiliser leur influence pour décourager ces spéculations infondées et irresponsables. »

-         « Utiliser des moyens de propagande pour nier et réfuter les attaques des critiques. Les résumés de livres et les articles sont particulièrement indiqués pour cette tâche. [...] Nous n’aurons qu’à employer le stratagème suivant : dire que les théories des critiques du rapport étaient théorisées avant même d’avoir des preuves, qu’ils étaient politiquement intéressés, étaient financièrement intéressés, aux résultats de recherche hâtifs, irréfléchis ou inexacts, entichés de leurs propres théories. »

-         « Nous dirons qu’aucune nouvelle preuve significative qui avait déjà été analysée par la Commission n’a été apportée par les critiques. »

-         « Une conspiration à une aussi grande échelle serait impossible à garder secrète parce que quelqu’un finirait par parler. »

-         « Si possible, faire référence au rapport de la Commission le plus possible. »

 

En d’autres termes, la CIA a créé les arguments pour attaquer les théories des « critiques » (« conspiracy theories »), sur leur fiabilité dans les années 1960, comme dans le cadre de ses opérations de guerre psychologique à l’étranger. Cet espèce de modus operandi après le rapport de la Commission Warren a été le même dans le cas du 11 septembre 2001 et de toutes les autres affaires qui se sont ensuivies, toujours dans l’augmentation de la pression jusqu’à aujourd’hui.

 

Enfin… « théories du complot », ça restera ce que la CIA en a fait en 1967 : la seule façon « démocratique » de faire fermer sa gueule à un penseur quand on n’a pas d’arguments à opposer aux siens. Tous les « noms d’oiseaux » sont un peu utilisés de même, comme « populisme » d’ailleurs.

 

 

 

 

Bonus 2 : Sur le « simplisme » des « théories du complot »

 

Jan-Willem Van Prooijen dans ses études dit que pour un esprit de « complotiste » peu éduqué, la tendance à vouloir une vision simplifiée des choses est grande et que c’est une des dimensions qui permet d’expliquer l’attirance aux « théories du complot ». Prenons un exemple au hasard : les attentats du 11 septembre 2001 à New York. La théorie officielle, présente dans le rapport de la Commission d’enquête sur le 11 septembre (encore une Commission ben oui), dit que 19 terroristes arabes de Al-Qaeda dont le chef était Ben Laden ont pris le contrôle d’avions de ligne commerciaux d’American Airlines et United Airlines partant de l’aéroport de Boston le matin du 11 septembre. Un premier avion a frappé une tour, plusieurs minutes après un deuxième avion a frappé l’autre tour, puis les tours se sont parfaitement effondrées verticalement un peu plus tard. On a vite pu savoir que c’était des terroristes de Al-Qaeda, notamment parce que sur le périmètre, après l’effondrement des tours, on a retrouvé le passeport intact d’un terroriste. Un autre avion s’est écrasé en Pennsylvanie et un autre dans le Pentagone, selon cette version. Ce qu’on demande aux gens de croire dans ce cas-ci, c’est que 19 pirates de l’air (et pilotes débutants) ont pu détourner des gros avions de ligne avec des lames de rasoir, les piloter ensuite pour les faire s’écraser 32 minutes plus tard dans des tours. Ensuite, on demande de croire qu’on a retrouvé par hasard un passeport, coup de chance. Les services de renseignement ont fait ce qu’ils pouvaient mais n’ont pas réussi à arrêter les terroristes. Il faudra venger l’Amérique, il faudra aller en guerre contre le terrorisme (war on terror). « Either you’re with us, or against us. –Bush » Il faudra aussi le PATRIOT Act, loi super liberticide d’état d’urgence, mais « temporaire on vous rassure », toujours en place depuis près de 20 ans maintenant.

 

Enfin, on a la version « épicée » « complotiss » : 9/11 was an inside job. En fait des stratèges avaient besoin d’un événement de type Pearl Harbor pour avoir une raison de déstabiliser tout le Moyen-Orient avec des guerres une après l’autre : Afghanistan, Irak, Libye, Syrie, et Iran à la fin. L’attaque sur le World Trade Center est l’excuse. Ben Laden a été financé par les Américains dans les années ’80 dans les années de la guerre d’Afghanistan où les intérêts américains faisaient face aux intérêts soviétiques. Les Ben Laden étaient devenus des grand-copains de la famille Bush. Enfin, cette version admet souvent que les tours ont été une démolition contrôlée, les explosifs ont été installés du sous-sol jusqu’aux étages supérieurs sur les colonnes d’acier centrales pendant ce qu’on a cru être des travaux de rénovation. Les explosifs contenaient de la thermite, une substance catalyseur permettant d’augmenter la température des poutres d’acier pour les faire fondre. Le fait qu’aucun avion de chasse militaire n’ait décollé pour abattre les deux avions n’est explicable que parce que c’était voulu. En effet, la chaîne de commandement militaire ce matin-là a décidé de ne pas envoyer d’avion de chasse militaire. Évidemment, tout ceci est un résumé succinct qui sort de ma mémoire. Il y a plus d’éléments que ça.

 

Je veux simplement montrer qu’il n’y a rien de simple du tout dans cette « théorie », donc je ne vois pas où Von Prooijen voit du simplisme, qui serait, selon lui, un gage d’attirance des cerveaux « peu éduqués » vers des « théories » à leur mesure.

 

En fait, le seul simplisme qu’il voit, je sais où il peut le voir. C’est dans l’idée que les « théories de la conspiration » poseraient que tout ce qui arrive est planifié, tout est soigneusement ordonnancé, une étape après l’autre, par des groupes de pouvoir. Tout est sous leur contrôle, alors en ce sens, « c’est simple ». Ce qui est complexe pour Van Prooijen, c’est le hasard, l’inconnu, que tout serait des coïncidences, des adons, des hasards. De l’effet papillon, de la théorie du chaos. « Oui mais c’est arrivé comme ça c’est tout. Ben oui, malheureusement, c’est juste 19 ti-counes qui ont détourné des avions. Ben oui, c’était pas planifié par un grand pouvoir occulte. » Comme Van Prooijen le dit dans son texte de 2017 à la 2ème page : « conspiracy theories is to provide straightforward explanations for complex and distressing events that are hard to comprehend otherwise […] conspiracy beliefs are grounded in a general tendency to embrace relatively simplistic ideas. »

 

Personnellement, je trouve qu’il n’y a rien du tout de simple dans cette théorie alternative du 11 septembre. C’est même en fait beaucoup plus complexe que la théorie officielle. Il y a beaucoup plus d’éléments à retenir, d’acteurs en présence, de dates, de profondeur historique (liens à faire avec des événements passés). Gérald Bronner, un autre cas comme Prooijen, un autre « débunkeur » pourfendeur de « complotisme » institutionnel subventionné, que j’ai cité auparavant dans le texte, affectionne l’extrême inverse du « simplisme » : le « millefeuille argumentatif ». Le millefeuille argumentatif, cela consisterait à utiliser un grand nombre d’arguments pour étayer, prouver une théorie, une assertion. C’est le contraire de la simplicité ! Mais ce qui me fait rire avec Bronner, c’est qu’il parle de « théories du complot » en tournant toujours autour du pot. Il ne parle jamais des théories en elles-mêmes et de leur éventuelle validité mais essaie toujours de parler de « ceux » qui en parlent.

 

C’est effectivement vrai que les théories sont souvent étayées par beaucoup de documentation. Là où est tout le problème, c’est justement de s’attarder à ces sources, et de la façon la plus neutre possible, les valider ou les invalider. Gérald Bronner ne se contente pas d’aller jusque-là, il reste en surface. Prooijen aussi. Mais on ne tue pas la vache à lait…

 

 



[5] Le NWO est aux Pays-Bas le conseil de recherche néerlandais en quelque sorte. Appelé le ZWO jusqu’en 1988, il a changé cette année-là de nom pour devenir le NWO. Au niveau des « liens fallacieux de méchant complotiste », évidemment, on ne peut s’empêcher automatiquement de faire le lien avec l’acronyme de l’expression New World Order (nouvel ordre mondial). Intentionnel ou pas, à moins de tomber sur une preuve, on le saura pas.

[6] David Rockefeller, 2002, Memoirs, début du chapitre 27.

[10] (Ben oui, je cite ta feuille de chou, on n’a pas grand choix au Québec, va falloir changer ça.)

https://www.lapresse.ca/vivre/sante/201409/10/01-4798797-laissez-dormir-les-ados.php

[12] https://www.b-society.org/ (description de l’idée de la B-society : Nos sociétés apprécient les lève-tôt (personnes A) - mais la plupart d'entre nous sont des lève-tard (personnes B). La mission de la B-Society est d'augmenter la qualité de vie et la productivité des personnes B en créant des horaires de départ plus tardifs dans les écoles et les lieux de travail. Nous devons nous libérer de la société 9 à 5 et de son manque de respect pour la personne B. La qualité de vie, la santé, l'infrastructure et la productivité s'amélioreraient si nous offrions aux gens les heures correspondant vraiment à leurs rythmes circadiens.) Moi, je pose l’hypothèse qu’il y a probablement des personnes, rares, C et D (aux horaires encore plus atypiques).

[13] Définition de psittacisme : Fait de répéter quelque chose comme un perroquet en raisonnant sans comprendre le sens des mots que l'on utilise; en particulier, récitation mécanique de mots, de phrases, de notions dont le sens n'a pas été compris ou a été mal assimilé (selon le CNRTL : https://www.cnrtl.fr/lexicographie/psittacisme)

[14] Le webjournal d’Alexis Cossette-Trudel : https://rumble.com/user/RadioQuebec En as-tu seulement écouté que quelques-uns au complet, sans œillères ni préjugés, écouté son argumentaire de la façon la plus neutre possible en écoutant les idées pour les idées, en allant vérifier les sources, à l’affût du déroulement logique, seulement qu’avec ta pensée critique ? Réponds pas c’est une question rhétorique.

[17] Pierre Falardeau, Le temps des bouffons, 1985. Cité dans le Monde diplo en 2012 :

https://www.monde-diplomatique.fr/mav/122/FALARDEAU/51893

[19] Bore-out: crever d’ennui dans une job répétitive, sans y trouver de signification ni d’accomplissement.

[23] Puisque tu as dit toi-même que cette chronique portait non pas sur le ‘complotisme’ mais sur les inégalités… ATD Quart Monde a vraiment insisté sur le caractère délétère des préjugés et idées fausses sur la pauvreté dans son document en disant : « Paresseux, profiteurs, fraudeurs... des repas de famille au conseil des ministres en passant par les médias, les préjugés brisent la vie des personnes qui les subissent, faussent les débats politiques, et nous empêchent de penser et d’agir pour mettre fin à la pauvreté ». J’imagine qu’y’a de tes lecteurs qui vont avoir à peu près ce genre d’image de la pauvreté quand y vont avoir fini de lire ton torchon : pas de dents, sans culture, quasi-analphabètes, inexistants, nuisants, ‘complotistes’ ». Anyway, t’es libre de dire ce que tu veux ! (selon le bon vouloir de tes boss bien sûr).

[24] La fin d’un régime de terreur à TVA, 24 septembre 2020.

https://www.lapresse.ca/affaires/2020-09-24/la-fin-d-un-regime-de-terreur-a-tva.php

[26] Le professeur émérite de la Florida State University, Dr. Lance DeHaven-Smith (DeHaven-Smith is Professor in the Reubin O’D. Askew School of Public Administration and Policy at Florida State University. A former President of the Florida Political Science Association, deHaven-Smith is the author of more than a dozen books, including The Battle for Florida, which analyzes the disputed 2000 presidential election. DeHaven-Smith has appeared on Good Morning America, the Today Show, NBC Nightly News with Tom Brokaw, CBS Nightly News with Dan Rather, the NewsHour with Jim Lehrer, and other national TV and radio shows) a dit ceci : « The CIA’s campaign to popularize the term “conspiracy theory” and make conspiracy belief a target of ridicule and hostility must be credited, unfortunately, with being one of the most successful propaganda initiatives of all time. » (Traduction: La campagne que la CIA a menée pour populariser les termes “théoricien du complot” et faire de la croyance en l’existence d’un complot une raison d’être ridiculisé et subir de l’hostilité doit être reconnu, malheureusement, comme étant l’une des initiatives de propagande les plus réussies de tous les temps.) J’ai lu le texte de Michael Butter dans theconversation qui tente de « débunker » le mémo de la CIA, où il dit que le texte ne fait aucune mention de « weaponization » du concept « conspiracy theorist ». Il ne s’agit pas de ça, pourtant. Il s’agit de reconnaître que ce mémo est clairement une marche à suivre, point par point, d’actions à poser afin de contrecarrer, neutraliser, les « conspiracy theories ». Pas avec un franc débat, vrai honnête minutieux, intellectuel, non, avec des stratagèmes. C’est juste ça le point.

[27] https://www.nytimes.com/1977/12/26/archives/cable-sought-to-discredit-critics-of-warren-report.html

Le New York Times lui-même dit dans l’article de 1977 : « The Central Intelligence Agency has often argued that its worldwide propaganda efforts are intended only to alter the climate of public opinion in other countries and that any “fallout” reaching the eyes and cars of Americans is both unavoidable and unintentional.

But a C.I.A. document, recently declassified under the Freedom of Information Act, provides a detailed account of at least one instance in which the agency mustered its propaganda machinery to support an issue of far more concern to Americans, and to the C.I.A. itself, than to citizens of other countries.  »

 

 

 

 


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